Médaille
de bronze de Christophe Kern
L'irrésistible ascension
Christophe Kern, tout sourire sur le
podium de Vérone, une médaille de bronze autour du cou.
(Photo AFP)
La surprise fut de taille, samedi dernier. Christophe Kern, l'espoir du VCNA, décrochait la médaille de bronze au championnat du monde sur route junior, à Vérone. La première de l'histoire du cyclisme alsacien. Récit d'une irrésistible ascension.
Du côté des Kern, la petite reine est une histoire de famille. Richard, le père, était connu dans le peloton pour ses qualités de sprinteur, mais surtout grâce à son titre de champion de France conquis voilà 30 ans. Normal, donc, que les deux fistons, Jonathan, l'aîné, et Christophe, aient très tôt enfourché leur première bicyclette.
Envie précoce
« Ils ont débuté à l'âge de 8-10 ans, à l'école de cyclisme de Soultz, se souvient Richard, et déjà à l'époque, Christophe affichait une volonté hors norme. Lors de l'une de ses premières courses, à 11 ans, sa chaîne avait déraillé juste avant le départ. Déçu et vexé, il a jeté rageusement son vélo à terre ! » Une petite anecdote qui reflète bien la personnalité du garçon, aujourd'hui âgé de 18 ans. Combatif à souhait, même un peu trop au goût de ses différents entraîneurs, affichant rapidement de belles qualités de rouleur et grimpeur, le petit Christophe a rapidement grimpé les échelons de la hiérarchie régionale. Que de chemin parcouru, en effet, depuis sa première victoire, lors d'une course organisée par son club à Rittershoffen, son village, en 1994. Là aussi, la petite histoire vaut le détour. « Jonathan était le favori de la course, en tant que minime 2e année. Mais ce jour là, il était malade. Christophe était surmotivé à cette idée, il s'est imposé alors qu'il n'était que minime 1ere année », explique Richard.
Traversée du désert
Les deux frangins feront alors régulièrement parler la poudre, notamment lors des championnats d'Alsace. Son premier succès d'envergure, Christophe le conquiert lors d'une épreuve du Challenge national, en Vendée, il y a deux ans. Les spécialistes lui présagent alors un bel avenir. Cependant, la malchance ne l'épargne pas. Une tendinite récurrente, suivie d'un bras cassé, le plonge dans une traversée du désert longue de deux ans. « Je pense que son moral d'acier lui a permis de surmonter les difficultés, rebondit Alfred Joerger, le président du VCNA, à l'instar du soutien sans faille de ses parents ». Christophe ne revient qu'à son meilleur niveau en début de saison. Vainqueur du Tour de Basse-Saxe, il passe au travers des championnats d'Alsace, puis de France. Ce qui n'altère pourtant pas la confiance de l'entraîneur national, Bernard Bourreau, bien décidé à faire de Christophe un pilier de la sélection pour les championnats du monde. Car, outre ses qualités de cycliste, Christophe développe un sens du sacrifice au profit du collectif très apprécié dans le milieu.
Sur un nuage
Une sinusite tenace compromet alors encore tous ses desseins. Presque contraint à l'abandon, Christophe attendra le dernier moment pour confirmer sa participation. 19e lors du contre-la-montre, son épreuve de prédilection, rien ne laissait alors augurer une issue favorable lors de l'épreuve sur route. Et pourtant, la suite est connue : « je retrouve mes sensations à mi-course, je sors à 2 km de l'arrivée, pensant alors être en tête car je n'avais pas vu les 2 échappés. Je franchis la ligne en vainqueur. Et même si je ne suis que 3e, cela équivaut à un succès » raconte l'intéressé. Le retour en Alsace se fait sur un air triomphal. Félicité, sollicité, remercié, fêté dignement, Christophe vit sur un petit nuage. Même s'il veut garder la tête sur les épaules. « J'ai repris cette semaine les cours à l'IUT, trois semaines après tout le monde. Il va falloir s'accrocher pour rattraper le retard ». Humble, le garçon reste avant tout terre à terre. Intégré désormais, en compagnie de Jonathan, au Pôle Espoir de Wasquehal, il pourra parfaire ses gammes, au gré du travail quotidien. « S'il garde cette mentalité là, je pense qu'il pourra passer en professionnel ». Le constat de son papa ne vaut pas du bronze, mais bien de l'or...
Sébastien Keller
© Dernières Nouvelles D'Alsace, Jeudi 14 Octobre 1999.